Balade à Vitré en compagnie de Victor Hugo
Autrice : Célia Boucheraux Publié le : 01 février 2024 Lecture : 4 min
Baladons-nous à Vitré dans les pas de Victor Hugo et découvrons des échos de son roman Notre-Dame de Paris.
Bienvenue à Vitré, Ille-et-Vilaine
Aujourd'hui, nous vous emmenons en balade à Vitré, ville située dans l'est de l'Ille-et-Vilaine, à la suite des mots de Victor Hugo.
Commencer par cette ville et cet auteur est symbolique : Amélie est originaire d'une commune limitrophe de Vitré et Célia y a vécu 5 ans. Victor Hugo, de son côté, outre son œuvre littéraire qu'il n'est pas nécessaire de présenter, a très fortement contribué à l'idée de patrimoine et de sa préservation telle que nous continuons de l'appréhender aujourd'hui.
Dans son roman Notre-Dame de Paris, Victor Hugo nous raconte l'histoire d'une très jeune gitane qui va devenir, malgré elle, l'objet de convoitise de plusieurs hommes. Les désirs de chacun vont se croiser, s'emmêler et finir par mener l'innocente à sa perte (pour une version plus joyeuse, vous avez toujours la possibilité de visionner l'adaptation de Disney). Comme son nom l'indique, la presque totalité du roman se déroule dans le périmètre de la cathédrale Notre-Dame de Paris en 1482, alors que la cathédrale est encore jeune mais déjà un élément central de la capitale. Victor Hugo choisit cette année pour faire revivre autour du monument tout un monde moyenâgeux dont les descriptions restent encore fortement imprimées dans notre imaginaire collectif. Et au-delà du romantisme de l’œuvre, ce récit, à travers ses descriptions et digressions, lui permet d'illustrer une de ses grandes théories qui est à un tournant décisif, à savoir qu'au Moyen-Age, l'architecture est littérature.
Selon Victor Hugo, l'architecture au Moyen-Âge est une forme d'écriture et surtout, les bâtiments sont alors des supports pour écrire une histoire, donner des informations (aujourd'hui nous parlerions de créer du storytelling) à une époque où l'écrasante majorité de la population ne lit ni n'écrit. Les habitants utilisent des symboles compris par tout le monde et il suffit à chacun de regarder autour de soi : les armoiries des familles (l'ancêtre du logo) sont exposées sur les frontons, l'encorbellement, c'est-à-dire l'avancement des maisons sur la rue, démontre la richesse du propriétaire, les professions sont regroupées dans un même quartier (nous en trouvons parfois encore la trace dans les nom de rues actuelles), etc. Du côté religieux, première source d'éducation de la population, c'est à travers les églises que la Bible s'inscrit et s'instruit : par les vitraux, par les sculptures et toute une symbolique sacrée. C'est ainsi que la façade de Notre-Dame de Paris, comme toute église, renseigne autant sur des scènes bibliques que sur les puissants commanditaires qui ont payé sa construction.
Cela peut paraître difficile à imaginer aujourd'hui mais à l'époque, tout le monde était capable de lire ce langage, cette symbolique et le Moyen-Âge et ses cathédrales extravagantes marquent ainsi l'apogée de cette littérature-architecture. C'est le développement de l'imprimerie, inventée en 1450, qui va faire basculer, au tournant du 16e siècle, l'âge de pierre à l'âge de papier, plus discret, plus modulable et plus circulable. La phrase architecturale devient phrase littéraire.
De Vitré au Moyen-Âge
Mais quel est le rapport avec Vitré ? Victor Hugo, en introduisant le lecteur au Paris du 15e siècle utilise ces termes :
C'était un beau tableau que celui qui se déroulait à la fois de toutes parts sous vos yeux ; un spectacle sui generis, dont peuvent aisément se faire une idée ceux de nos lecteurs qui ont eu le bonheur de voir une ville gothique, entière, complète, homogène, comme il en reste encore quelques-unes, Nuremberg en Bavière, Vittoria en Espagne ; ou même de plus petits échantillons, pourvus qu'ils soient bien conservés, Vitré en Bretagne, Norhausen en Prusse.
En effet, déjà au 19e siècle, la conservation du centre ville vitréen fait forte impression aux romantiques, dont Victor Hugo reste le chef de file et une figure emblématique. Avec ses maisons en pan de bois déjà exceptionnelles et particulièrement nombreuses pour l'époque, ses différents types d'encorbellements, ses rues pavées aux recoins et détours typiques des très vieilles villes et surtout, sa cohérence architecturale presque intacte, Vitré donne une impression pittoresque à qui la visite.
Vous pouvez ainsi parcourir la rue de la Poterie sous les encorbellements, faire le tour de la maison de l'Isle avec ses trois murs à pans de bois (une exceptionnelle rareté), déjeuner dans la rue d'En bas, remonter explorer le château après avoir contemplé les colombages de la rue Baudrairie, et finir par essayer de déchiffrer l'église Notre-Dame (pas celle de Paris) et son plafond de bois peint. Si vous êtes de caractère aventurier, vous pourriez même découvrir un des petits passages encastrés entre les maisons.
Finalement, pas besoin d'aller à Paris, il suffit de flâner dans le centre de Vitré pour remonter dans le temps...
Pour aller plus loin...
Vous trouverez toutes les informations pour visiter Vitré sur le site de Vitré Tourisme.
Si vous souhaitez explorer cette thématique des symboles, nous vous recommandons de suivre le travail de Léah Thomas-Bion à travers Callianthus.
Sources
(1) Hugo, V. (1831) Notre-Dame de Paris, Livre III Chapitre 2